"Ladies and gentlemen: "Mesdames et Messieurs:
We will be taking off shortly. Nous allons bientôt décoller.
Please fasten your seat belt. Veuillez attacher votre ceinture.
Thank you." Merci."
Phrase magique s'il en est! Sésame d'un envol pour d'autres cieux, au dessus des nuages. Mais pour l'entendre dans l'Empire du Milieu, il faut régulièrement s'armer de patience.
Le trafic aérien est en effet une source de mécontentement grandissant parmi les usagers toujours plus nombreux à emprunter la voie des airs pour se rendre aux quatre coins de la Chine et d'ailleurs.
Des minutes, des heures voire des jours de retard en raison de congestion aéroportuaire, avec une moyenne de 4 heures de retard selon l'Aviation civile.
En cause: la régulation des vols, une régulation assurée par l'Armée de l'Air.
La grande Muette dispose en effet du monopole sur l'Espace aérien chinois. Elle en a toutefois octroyé, dans sa grande bonté, 23% au trafic commercial. Mais cette part n'est plus aujourd'hui suffisante pour absorber l'augmentation croissante des vols domestiques et internationaux, entraînant une saturation des aéroports qui fonctionnent, qui plus est, à flux tendu.
Un flux régulé de manière très aléatoire, en temps réel dans une organisation des plus désorganisées. Une liste des vols prêts au décollage est ainsi établie sans priorité ni logique, et peut aux heures de pointe s'allonger dangereusement, provoquant au moindre petit incident un embouteillage monstre.
Pour éviter de pâtir d'un retard en cascade sur leurs lignes, les compagnies ont trouvé une parade: embarquer les passagers le plus tôt et rapidement possible afin d'être en lice et espérer ainsi décoller à l'heure.
Une véritable course contre la montre qui n'est pas gage de succès cependant. Car une fois dans l'habitacle, la promesse d'un décollage imminent, certes plus proche que dans le terminal, n'est pas encore assurée. Vous pouvez très bien attendre quelques heures dans votre siège numéroté que les contrôleurs aériens daignent autoriser votre avion à décoller.
Mon record personnel est de 4 heures pour un trajet d'une heure... rien, cependant, en comparaison des 22 heures qu'ont pu passer, en juin dernier, des passagers dans un avion yunnanais avant d'être autorisés à quitter le tarmac.
Sachez que ce genre de mésaventure n'est absolument pas pris en considération pour un quelconque dédommagement ou remboursement de votre billet ou des frais ayant pu être engagés. Sauf cas extrême. mais même dans ces cas, le montant alloué est réellement dérisoire.
Ainsi bloquée à Kunming pour la nuit après un aller-retour aéroporté rocambolesque du aux conditions météorologiques, j'obtins 100 RMB, l'équivalent, tenez-vous bien, de... 10€ pour trouver une chambre dans les hôtels alentours. Même pas de quoi se payer un petit déjeuner. Pourtant les Chinois empochèrent ladite somme et partirent sans mot dire.
Vous vous en doutez, la frisée n'a pas pu s'en tenir là. Etrangère et habituée aux remboursements SNCF et hébergement d'appoint, je fis constater calmement au steward présent que les 100 RMB étaient insuffisants. Sans broncher l'homme d'équipage me demanda contre toute attente de patienter quelques instants après quoi, il me conduisit devant un bus vide, bien entendu, dans lequel je montais, avec mon acolyte, en direction d'un hôtel réservé et prévu pour ce type de désagrément. Aucun autre passager n'aura bénéficié de ce service existant, ayant payé, en plus de son billet, une chambre plus le taxi aller-retour. Un véritable vol organisé!
Mais les mentalités changent et les usagers fédérés en association, commencent à se saisir de ces questions, émettant des revendications officielles. La dernière en date demandait le remboursement systématique des retards par les compagnies aériennes. Sera-t-elle entendue? Il se pourrait bien.
Car les retards n'ont pas que des conséquences chronologiques, elles induisent une chaîne de retards pouvant impacter l'économie chinoise, et dès que l'on parle business en Chine, les oreilles comme les portes s'ouvrent.
Sous la pression gouvernementale, l'Armée de l'Air semble ainsi encline à libérer des couloirs aériens, ouvrir ses aéroports aux civils, réduire les intervalles entre les avions... Les compagnies aériennes restent sourdes pour le moment mais pourraient bien vite changer d'avis avec le développement concurrentiel des trains express dont les lignes construites à grande vitesse n'ont ni retard ni embouteillage. Preuve de l'engouement qu'elles suscitent déjà, depuis son ouverture en juin dernier, celle reliant Shanghai à Beijing, en quatre heures, ne désemplit pas .
Reste cependant à reconnaître que si la Chine détient des records en terme de retard, elle est aussi un des pays où l'on peut arriver par avion... en avance! Mais pas de deux ou trois minutes, même dix: près d'une heure d'avance sur l'horaire prévu! Pour un trajet de deux heures, ça c'est du vol!
Rien d'extraordinaire pourtant dans son déroulé ou sa destination en l'occurrence Guangzhou 广州 alias Canton. Sauf peut-être dans le fait que j'étais attendue à mon arrivée; attendue et pas par n'importe qui: par un expert de l'envol s'il en est, Monsieur Pan de son prénom Peter!
Mais c'est une autre histoire...